Lavement des pieds
Pour en revenir à cette préoccupation de Jeshua qui consistait à vouloir gommer les différences séparant manifestement les êtres humains et en affirmant l’équilibre entre l’offrande et la réception, je citerai ici l’événement du « lavement des pieds ». Je vous dirai tout d’abord que cet épisode de la vie du Christ n’eut pas lieu qu’une fois mais qu’il se produisit à de multiples reprises. Laver les pieds d’un maître spirituel était chose classique et normale dans la culture de l’époque, tout comme cela l’est encore de nos jours dans la Tradition ancestrale de l’Inde, par exemple. Dans une telle attitude d’esprit, ce n’est pas s’humilier ni s’infliger pénitence que de laver les pieds d’un être que l’on estime être plus avancé spirituellement que soi. Cela ne signifie pas non plus vénérer sa personnalité humaine mais reconnaître et honorer le Feu divin s’exprimant à travers Lui. Les pieds sont alors considérés comme particulièrement sacrés puisqu’ils représentent le point de contact entre le corps du Maître – l’Esprit – et la terre qui L’accueille – la Matière dense.
Que le Christ ait inversé les rôles en lavant à son tour les pieds de ses proches représente bien sûr une révolution dans la mentalité de l’époque. Cela s’inscrit exactement dans le ligne de pensée de son enseignement, à savoir que le mouvement de la Vie est basé sur un échange continuel.
S’il Y a parmi les âmes incarnées des fleurs plus ouvertes que d’autres, même celles qui sont encore en bourgeon sont une promesse qui nourrit le coeur. Ainsi, par son geste, Jeshua illustrait le fait que, d’une part, nous sommes tous sans le réaliser, des maîtres les uns pour les autres et que, d’autre part, la Divinité réside au même titre en chacun de nous.
Par le lavement des pieds, c’est la Présence de l’Étincelle divine en chaque femme et chaque homme qu’Il tenait à souligner et à honorer. Par ailleurs, pour bien marquer les esprits, le Maître eut soin d’inverser les rôles non pas seulement une fois, comme indiqué dans les Évangiles, mais à plusieurs reprises. Pour Lui, Dieu était en chacun aussi sûrement que nous étions tous en Lui. Se penser séparés de Sa Réalité et de Sa Présence était par conséquent un non sens, une aberration d’amnésique. Bien que cette attitude fût révolutionnaire il y a deux mille ans, il faut malgré tout être conscient du fait que le Christ n’a pas été le premier à la proposer sur cette Terre. Le principe qui la sous-tend faisait déjà partie des enseignements de base de la Fraternité essénienne, notamment de celle qui vivait au monastère du Krmel. N’oublions pas que cette Communauté en avait elle-même hérité de la Tradition égyptienne instituée environ mille cinq cents ans plus tôt par le Pharaon Akhénatonl, lequel voyait en chaque être humain un prêtre potentiel par essence, un véritable réceptacle du Divin. Une semblable disposition d’esprit peut, reconnaissons-le, prêter à rire lorsque l’on considère le triste spectacle des monstruosités commises par l’espèce humaine… ou qui se prétend telle. Ce « spectacle » est même l’un des arguments majeurs à la négation de l’existence d’un Principe divin. Il le sera toujours tant que nous n’aurons pas désinfantilisé notre façon de concevoir cette Energie appelée Dieu.
C’est la tâche démesurée a laquelle Jeshua s’est attaché. Éradiquer les racines de la puérilité, de la dépendance et du réflexe viscéral de dualité n’est pas concevable en deux petits millénaires car cela requiert une maturation naturelle qu’aucun Maître de Sagesse ne saurait remplacer, fût-il le Christ. – « Celui qui ne grandit pas par lui-même ne grandit pas vraiment; il donne seulement l’illusion de la croissance en faisant plaisir à ses instructeurs. S’il ne lâche jamais la main de ceux-ci, il ne se trouve pas lui-même et, ne se trouvant pas, il continue d’ignorer la vraie nature de l’Éternel. Je vous le dis, tant que vous vous penserez étrangers à Sa Réalité, vous L’accuserez des injustices et des ignominies de ce monde. Souvenez-vous que vous êtes Sa Liberté qui s’exprime et qu’ainsi vous ne rencontrez que ce que vous engendrez depuis l’aube des Temps. Si chaque jour, par mille petits détails, vous soufflez le vent de la dispersion, ne vous étonnez pas qu’une énorme bourrasque de séparativité puis de dissolution finisse par vous revenir.
L’Éternel est fait de cette Lumière absolue et sans ombre qui contient la lumière et l’ombre. Même par cette ombre, qui est un ennui de Lui, Il clame Sa Présence en vous.» Des paroles comme celles-ci conduisirent parfois le Maître à entamer des commentaires majeurs quant à la nature de Celui qu’Il nommait son Père. À ceux qui pouvaient l’entendre, Il n’hésitait alors pas à dire que cette appellation n’était autre qu’une convention puisque, dans le fond de son coeur, cette Force apparemment paternelle, n’était ni masculine ni féminine mais englobait ces deux principes. Si accepter une telle idée nous paraît évident aujourd’hui, c’est la preuve que « quelque chose » a changé en nous qui nous rend un peu plus capables d’aborder le concept
de Dieu de façon moins anthropomorphe. Depuis le début de notre Ère ou presque, les autorités religieuses ont laissé croire à toute la Chrétienté que le « Notre Père » est une prière qui a été composée par le Christ. Les théologiens honnêtes savent pourtant fort bien qu’il n’en est rien. Il s’agit d’un texte très ancien rattaché à la même Tradition que celle qui est à la base du « Sermon sur la montagne »l. Par contre, ce que l’on ignore mais que gardent gravé les Annales akashiques, c’est que le Maître prit plaisir, en notre présence, à composer une prière analogue qu’Il adressa à la Mère divine. Celle-ci fut notée à la fois par Jean et par Judas. La voici, telle que je peux la restituer aujourd’hui selon mon souvenir car il nous arrivait de la réciter collectivement comme une petite litanie, sur trois ou quatre notes tandis que nous marchions par les sentiers :
Notre Mère… Mère divine,
Toi qui nous accueilles sur Terre comme aux Cieux Que Ta Présence habite notre âme,
Que la Lumière prenne corps en nous Et qu’ainsi Ton Souffle purifie toute chose dans l’unité des mondes. Fais que chaque jour nous soit une vraie nourriture,
Rends-nous conscients de nos manques Et donne-nous la force de tendre la main à ceux qui trébuchent.
Offre-nous le discernement Et englobe-nous dans le Soleil de Ton Amour
Car il n’est que Lui pour seule Demeure.
Je suis personnellement convaincu que si cette prière n’est pas parvenue à passer les siècles comme le « Notre Père » c’est parce qu’elle a très vite fait l’objet d’une mise à l’index de la part des premiers « bâtisseurs » de l’Église. Son côté féminin dérangeait inévitablement les patriarches qui ont structuré l’architecture du dogme qui domine devrais-je dire sévit – encore aujourd’hui. Seule l’École d’Alexandrie, avec le Mouvement gnostique!, a osé retransmettre dans ses enseignements la place que revêtait l’élément féminin dans le coeur du Christ. On a tout fait pour détruire les textes qui en portaient témoignage… Je ne serais cependant pas étonné que certaines caves vaticanes en gardent encore précieusement et secrètement la trace.
Bien sûr, il n’est pas plus juste de vénérer le « visage » féminin de Dieu que son aspect masculin, aussi reste-t-il « quelque chose » à inventer dans notre vocabulaire courant pour tenter d’exprimer de manière lumineuse ce que la notion d’hermaphrodisme ne parvient pas à traduire par son caractère trop incarné. L’Ain Soph des Kabbalistes, l’Inconnaissable, est peut-être le terme qui laisse transparaître le mieux l’Essence de cet Absolu qui nous échappe sans cesse. Je l’ai déjà signalé dans ces pages, la place que le Maître accordait à la sensibilité féminine au coeur de son enseignement comme dans sa vie quotidienne est certainement l’un des facteurs qui a le plus dérangé la société de son temps et, a fortiori, tout le Collège du Sanhédrin devant lequel Il fut traduit après son arrestation. Le pouvoir mâle supporte difficilement l’idée de devoir partager son autorité… tout comme le pouvoir femelle lorsqu’il oublie sa sensibilité féminine pour imiter le jeu masculin. Les messages Esséniens – Daniel Meurois-Givaudan - les enseignements premier du Christ.
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