LE MYSTERE DE CHACO CANYON
« Une fois que l’on a entendu ce son, impossible de l’oublier »
La voix de l’homme d’apparence surannée qui m’a dit cette phrase résonne encore dans ma tête. Il avait raison. La grande quantité de quartz contenue dan le sable sur lequel je marchais produisait un son étrange, un craquement aigu qui se répercutait sur les murs de grès du canyon s’élevant autour de moi. A chacun de mes pas, le son du pas précédent s’estompait en même temps que celui du pas suivant atteignait mes oreilles en se mêlant au brut du vent pour former un refrain continu accompagnant ma marche
Je trouvais paradoxal que chaque grain de sable ou de quartz craquant sous mes pas ait déjà été enfermé dans le gré durci des falaises bordant la piste. Sous d’innombrables tempêtes et inondations ainsi que par des années de gel et de dégel, de minuscules grains se sont détachés des murs pour devenir des fragments encore plus petits craquant sous mon poids.
C’était par un matin de fin d’août, dans le haut désert des Four Corners (« les quatre coins ») une région au nord du Mexique. J’avais rencontré ce vieil Amérindien sur la piste, plus tôt ce matin-là. Pour des raisons que ni lui ni moi ne mettions en doute, nous avions été attirés tous les deux vers le même site cérémoniel, le même jour à la même heure. Nous avons alors cheminé ensemble sur la piste sableuse qui se déroulait parallèlement aux falaises jaunâtres s’élevant du fond de la vallée. Nous étions venus là tous les deux pour apprendre quelque chose du passé, lui de ses ancêtres par leur voix dans les cavernes, moi des temples, des dessins et des indices qu’ils avaient laissés derrière eux.
« Ici, il n’y avait pas de guerres », me dit cet homme au moment où nous nous arrêtions tout près d’un monticule pour reprendre notre souffle. « Les gens qui vivaient ici n’avaient pas besoin de faire la guerre ».
Je lui demandai alors : « Vraiment ? Comment le sait-on » ?
Il me répondit ceci : « C’est l’un des plus grands mystères que découvrent les scientifiques quand ils font des fouilles ici. Ce lieu nous semble énorme, mais ce n’est qu’une partie de la communauté qui était établie ici. Plus de quatre mille personnes vivaient dans cette vallée et dans ces constructions », me dit-il en ouvrant les bras vers la vallée qui s’étendait devant et derrière nous. « Mais ces gens vivaient pacifiquement. On n’a trouvé ici aucune arme. Aucune. Il n’y a aucune trace de guerre. Aucune. Il n’y a pas de fosses communes, pas de cendres, pas de cimetière ». Et il conclut par cette phrase : « Nos ancêtres n’en avaient pas besoin, car ils avaient appris à vivre autrement ».
J’écoutais très attentivement ce que mes disait mon ami amérindien. Ce qu’il ne savait pas, ce qu’il ne pouvait pas savoir, c’est que l’information qu’il me livrait ce matin-là constituait la raison même pour laquelle j’étais venu dans ces lieux.
Nous nous trouvions sur le site de CHACO CANYON, au Nouveau-Mexique, un endroit unique au monde. Ce site est un mystère pour plusieurs raisons. Une multitude de théories existent, qui tentent d’expliquer ce que nous vouons là, mais en vérité, nous ne savons pas grand-chose des anciens habitants de Chaco Canyon. Nul ne sait où ils sont allés ni pourquoi ils ont disparu. On ne peut être sûr de rien, car ils n’ont laissé aucun témoignage écrit, pas sous une forme que nous connaissons aujourd’hui du moins.
Ce que nous avons, par contre, c’est que dans ce lieu qui est l’un des plus isolés et des plus hostiles d’Amérique du Nord, un peuple mystérieux venu de nulle part a construit, pour des raison qui restent obscures, des habitations, des communautés et des centres cérémoniels sur une échelle sans précédent pour l’époque et les suivante. Ce peuple semble être arrivé là avec toute sa technologie. Autrement dit, ces gens-là n’ont pas commencé par un mode de vie primitif pour évoluer lentement, par étapes, sur une longue période jusqu’à parvenir à cette sophistication qui distingue ce site des autres de la région. Presque du jour au lendemain, ils ont possédé le savoir-faire architectural nécessaire pour construire des maisons de quatre étages et pour créer des réservoirs et des structures de détournement de l’eau afin de capter les précieux liquide ; Il en a résulté une agriculture qui a pu soutenir une importante population et qui a atteint son sommet eu début du XIIè siècle de notre ère.
Même si, apparemment, ces gens ne connaissaient pas la roue, ils ont construit des routes parfaitement droites s’étendant sur des centaines de kilomètres dans toutes les directions, des routes que l’on a reconnues comme telles grâce aux images fournies par les missions spatiales Apollo de la NASA au cours des années 1970. Aussi subitement qu’ils sont apparus, ces gens ont disparu. Bien que certaines théories attribuent leur disparition à une sécheresse prolongée ou à d’autres phénomènes climatiques extrêmes, nul ne sait vraiment qui ils étaient, d’où ils venaient et pourquoi ils sont partis.
Mon vieux camarade avait raison. Après un siècle de recherches, de fouilles difficiles et d’une étude intensive de la tradition orale des descendants de ce peuple, on n’a toujours pas trouvé de traces de guerres à Chaco Canyon. Le site ne comporte aucun des murs protecteurs que l’on s’attendrait à voir dans un complexe aussi énorme, aucune arme, aucune fosse commune ni aucun squelette mutilé.
Comme s’il avait lu dans mes pensés, mon compagnon amérindien répondit à ma question suivant avant même que je la pose. Je me demandais en fait pourquoi ce site avait été chois pour construire un complexe aussi vaste. Pourquoi là ?
« Ils l’ont construit ici en raison de ce qui se trouve sous le sol, me dit-il. Chaco n’est pas le premier site à avoir existé ici. C’est seulement le plus récent ; Il est construit par-dessus celui qui se trouvait ici auparavant, lequel avait été construit sur le précédent »….
Bien sûr, je le croyais, mais il me fallait quand même lui demander ceci : « Comment pouvons-nous en être sûrs ? Comment savoir réellement qu’il y avait autre chose ici avant cet ancien temple » ?
Il n’eut aucune difficulté à répondre à ma question : « Les Anciens nous le disent ».
Leurs histoires maintiennent vivant le souvenir de leurs ancêtres, lesquels conservaient le souvenir de leurs propres ancêtres.
retranscrit par Francesca du blog http://francesca1.unblog.fr/
Extrait du livre de Gregg Braden : Vérité essentielle – Activer la mémoire de nos origines, de notre histoire et de notre destinée aux Editions Ariane
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